La Bellone

CONFÉRENCE

Module dramaturgique #1

28/01 > 1/02/2019
10:00 > 17:00


Suite des fichiers audio

Objectif général.

En Belgique francophone les pratiques dramaturgiques sont méconnues. Il y a un manque à combler tant chez les étudiant·e·s de programmes universitaires connexes (arts, arts du spectacle) que chez les étudiant·e·s diplomé·e·s des académies à vocation artistique (danse, théâtre, performance). 
Nous remarquons un vrai manque de connaissance de cette fonction quoique incontournable dans notre secteur tant au sein des lieux de diffusion qu’au sein des équipes de création. C’est pourquoi La Bellone propose un cycle de modules alliant théorie et pratique qui répondrait au besoin du secteur des arts de la scène, tant aux étudiant·e·s qu’aux praticien·ne·s autodidactes. 
La conception des quatre modules proposés prend en compte la réalité des étudiant·e·s et des praticien·ne·s en leur permettant de suivre notre programme de modules tout en poursuivant leur cursus académique (le programme de modules sera intégré au cursus des étudiant·e·s en Master Arts du Spectacle de l’ULB) ou en travaillant à leur création. 

Objectifs spécifiques des modules.

Plus qu'à une histoire ou à une théorisation de la dramaturgie, les participant·e·s sont ici invité·e·s à saisir, cerner et pratiquer la dramaturgie en s'essayant à la fois à dresser une cartographie des pratiques dramaturgiques et à pouvoir s'y situer. Il s'agit ainsi non pas de définir une pratique qui, en tant que telle, sort du cadre définitionnel puisqu'elle n'a pas de 
« fins » et de contours fixes et figés – ceux-ci bougent selon les modalités d'activation dramaturgique (au plateau, en institution, dans la conception de dispositifs divers...) – mais plutôt de proposer une méthode de double singularisation : singulariser ce qui fait, aujourd'hui, le paysage dramaturgique et ainsi voir apparaître, pour chacun·e, ce qui singularise sa propre méthode de faire. À partir de là s'entame un chemin d'étude situé, le long duquel le/la participant·e peut davantage reconnaître la spécificité de sa méthode, de ses outils mais aussi, par-là, expérimenter d'autres manières d'en faire usage ou de les affiner en regard des spécificités des autres. 

Les modules. 

4 modules correspondant à 4 activations de la dramaturgie aujourd’hui. 
Orientation : partage de savoir et mise en expérimentation. Partir d’une problématique à laquelle le ou la praticien·ne invité·e fait face et ouvrir cette recherche ou réflexion plutôt que de faire une présentation d’un savoir. Mise au travail et mise en partage plutôt que d’une formation académique. Chaque module, étendu sur une semaine implique : 
- L'intervention d'un·e praticien·ne dramaturge, choisi·e et invité·e en ce qu'il, elle active l'une des modalités spécifiques de cette activité et peut ainsi en dresser les enjeux singuliers auprès des participant·e·s. 
- Il s'agit aussi, pour chaque intervenant·e, de pouvoir mettre en partage des outils, des protocoles de recherche et d'écriture ou encore de proposer des situations permettant l'application de ce type-là de dramaturgie. 
Le programme de modules sera intégré au cursus des étudiant·e·s en Master Arts du Spectacle de l’ULB. Chaque module incarne ainsi, à l'échelle concentrée d'une semaine, l'esprit général et transversal du programme « Pratiques dramaturgiques » : une circularité entre exposé et pratiques, entre parole de l'un·e et ressaisie collective et partagée de questionnements et expérimentations. Il s'agit de se mettre, au sein d'un espace de recherche et création artistique, en état « d'étude », c'est à dire d'une alliance entre « enquête » et 
« application » (cf. étymologie du mot). 
- Les modules seront donc toujours structurés en au moins deux temps : un temps « à la table » dans lequel le groupe est rassemblé pour se mettre à l'écoute et à la discussion d'une question, d'une problématique ; un temps d'expérimentation qui peut conduire les participant·e·s à un travail propre d'écriture, à une fréquentation d'une réalisation de plateau ou encore à la visite d'un autre lieu artistique ou un autre contexte selon le type de 
« dramaturge » qui intervient sur chaque module. 

Semaine type :
Lundi-Mardi : 10h-13h & 14h-17h Mercredi : travail individuel
Jeudi-Vendredi : 10h-13h & 14h-17h 

28 janvier au 1 février 2019 :
Camille Louis 

Depuis quelques années, le même nom de « dramaturgie » est attribué à des pratiques et modes d'interventions pourtant distincts.
Sur la scène artistique contemporaine, on rencontre donc tout autant des dramaturges de plateau – qui accompagnent des créations théâtrales ou chorégraphiques – que des dramaturges-performeur·se·s – qui viennent incarner en leur nom un texte dramatique qu'ils/elles ont pu écrire et dont le traitement scénique n'est donc plus réservé aux seul·e·s metteur·se·s en scène – que des dramaturges de festival ou encore des dramaturges associé·e·s à une Institution (théâtre, centre de création, École d'Art....). Plutôt que de considérer cela comme une dérive qu'il faudrait corriger en revenant à
« La Vérité » de la dramaturgie, peut-être faut-il plutôt lire ici une des caractéristiques permanentes d'une activité dont le seul propre serait de ne pouvoir se laisser appropriée par aucune définition unique. Puisque le mouvement, le déplacement, l'énergie de l'invention sont d'emblée inscris dans son seul nom (drama-ergon : action-création ou mouvement), peut-être ne peut on s'approcher de la dramaturgie qu'en commençant par s'éloigner des formes d'appropriation trop souvent exigées par la démarche théorique.

Dans ce premier module nous privilégierons donc une approche expérimentale ou tenterons de reconnaître la production de savoir contenue dans ce que l'on nomme
« expérience ». Nous partirons donc des expériences concrètes de création dramaturgique, que celle-ci prenne la forme d'un écrit, d'un apport au sein d'une création scénique ou de l'invention d'un déroulé de festival. Nous nous arrêterons tout particulièrement sur le dernier cas mentionné précédemment : la dramaturgie d'Institution pour saisir la manière dont une pratique du déplacement peut se maintenir tout en s'installant dans une place identifiée et ce qu'elle est en mesure, alors, de garder en mouvement au sein des maisons qui ont précisément pour mission première celle d'accompagner ce qui ne peut être autre que mouvement : la création. 

Camille Louis est philosophe et dramaturge. C'est au sein du collectif européen kom.post - co-initié en 2009 avec Laurie Bellanca - qu'elle développe ses différentes expérimentations dramaturgiques, à la frontière de la performance et des formes de débat collectif (La fabrique du commun ; Autour de la table ; L'occupation des ondes...). Cherchant à explorer les rapports de la création artistique à l'action politique, Camille Louis ne cesse de reprendre et de déplacer les possibilités contenues dans la notion de dramaturgie au sein d'une pratique « mouvementée » de
celle-ci. Son travail rencontre ainsi une pluralité de scènes européennes (Festival d'Avignon ; Tanz Im August, Berlin ; Biennale de Moscou ; festival Troubles, Bruxelles ; Festival des Quatre Chemin, Port au Prince ; Mir Festival, Athènes ; festival Hors Pistes, Centre Pompidou, Paris et festival Mondes Possibles, théâtre Nanterre-Amandiers dont elle fut dramaturge) qui, chaque fois, redistribue les conditions d'invention d'une écriture « en situation ».
Celle-ci s'incarne aussi dans ses travaux de philosophe qui, pour s'élaborer, partent toujours d'un terrain arpenté, expérimenté, rencontré à partir des récits singuliers plutôt que depuis une grille théorique préposée. C'est notamment le cas des recherches et actions qu'elle mène, depuis plusieurs années, auprès des résistances politiques en Europe (tout particulièrement à Athènes) et des populations exilées (tout particulièrement à Calais).