La Bellone

RÉSIDENCE / ÉCRITURE

Iphigénie à Kos

5 > 17/10/2020
Visuel © D.R.

Une scène : Aulis aujourd’hui. Là où Euripide a placé le décor de sa pièce consacrée à Iphigénie, les restes d’une ancienne carrière, une usine à produire du béton, fermée depuis des années, un chantier de construction naval. Un concentré de pratiques extractivistes. Paysage ravagé et ruines. Un concentré de ce monde devenu inhabitable et nos vieux mythes infréquentables. J’ai grandi près d’Aulis, c’est à côté de la ville de mon enfance. Un jour, j’ai rencontré une autre Iphigénie. Cette fois, ce n’était pas le nom d’une fille qu’on devrait sacrifier, mais une vielle sage-femme aidant une femme enceinte, réfugiée de Cameroun, à accoucher. C’était sur l’île de Kos, près des frontières, là où la mer Egée est transformée depuis tant d’années en un cimentière à ciel ouvert.

 

Tant que cela maintient le cauchemar, TINA aime bien caresser notre mythomanie comme des cheveux d’ange. There Is No Alternative. Chaque jour, elle promet un jour d’ « après » qui serait l’immonde en pire.

 

« Iphigénie à Kos » ruisselle entre le documentaire et le mythe. Quelle vie et quels sacrifices ? Comment habiter des ruines et jardiner des espérances ? Que peut une scène ?

 

Maria Kakogianni est née à Athènes en 1978, elle vier et travaille en France depuis une vingtaine d’années.

Écrivaine, mais aussi philosophe de formation, dans sa pratique d’enseignement, elle propose des ateliers et des séminaires dans différentes universités, des institutions artistiques, mais aussi des tiers-lieux. Cette circulation entre différents lieux s’accompagne d’une expérimentation des formes de transmission. Comment transmettre ? Comment écrire ? Dans quelle écologie des pratiques et plasticité des formes ?

En 2012, elle publie son premier ouvrage, issu de sa thèse de doctorat de philosophie : De la victimisation (L’Harmattan). Plutôt que de rendre lisible la domination du genre dans les textes classiques de l’antiquité grecque, le livre se propose comme une expérimentation de ce que pourrait être un « acte de lecture ».

 

En 2017, suite à l’invitation de Camille Louis, elle rejoint le collectif interdisciplinaire kompost. De la création radiophonique à l’installation plastique ou la mise en place de conversations sténographiées et expérimentales, kompost propose des dispositifs in situ prenant multiples formats. Elle participe à des nombreuses créations signées par le collectif, tout en développant d’autres collaborations avec ses membres, notamment avec Camille Louis et Laurie Bellanca.

Dans son travail d’écriture, parmi ses publications, on retrouve Printemps précaires de peuples (éditions Divergences, 2017) et Ivre décor (Hippocampe éditions, 2020). « Iphigénie à Kos » est son premier projet d’écriture qui concerne directement la scène. En 2020-2021, il fera l’objet de deux résidences d’écriture, une à La Bellone et une autre à La Maison des langues à Aubervilliers, ensemble avec Laurie Bellanca.